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Drainer, c’est bio ?? Drainer pour une meilleure vie dans le sol

Pour se développer harmonieusement, les légumes ont, comme tout le vivant, besoin d’une alimentation en eau «correcte», c’est à dire adaptée à leurs besoins physiologiques : «ni trop ni trop peu ». En cas d’excès d’eau, le paysan-maraîcher doit donc s’adapter… par l’utilisation des outils appropriés.

=> De tous temps, l’enjeu de la production alimentaire aura été de tenter de limiter au maximum le risque de « disette » qui était provoqué par la conjonction

  • du retard des premières récoltes de début de saison pour cause de météo défavorable à l’établissement ou au développement des premiers semis,
  • de l’épuisement des stocks alimentaires hivernaux (céréales, légumes-racine, légumineuses à graines…) insuffisants qui avaient été entièrement consommés.

D’où l’expression « c’est la fin des haricots » dont nos « civilisations » locales et contemporaines ont eu tendance à oublier le sens…

Malgré l’évolution des techniques de production – et surtout de conservation – le phénomène se perpétue encore à nos époques, bien sûr avec des proportions bien moins terribles : c’est ce que les maraîchers nomment « la soudure » .

=> « Dame Nature » a ainsi conçu les choses de la vie que, pour se développer,

  • le végétal a besoin de bonnes racines,
  • les racines ont besoin d’un sol aéré, assez réchauffé, modérément humidifié.

 

Et c’est bien connu : l’eau dans le sol chasse l’air, ce qui provoque des asphyxies.

Ces exigences « botaniques » expliquent cette loi naturelle qu’il est très difficile – voire impossible – de faire pousser correctement, pour nourrir toute l’année, de beaux légumes «n’importe où».

  • L’excès d’eau, particulièrement en fin d’hiver / printemps dans les terres empêche dans un premier temps le jardinier de préparer la terre pour jardiner.
  • Puis quand (si) les légumes ont été semés ou repiqués, l’excès d’eau empêche les racines de s’implanter correctement, c’est à dire de descendre à leur profondeur physiologique.
  • La faiblesse du système racinaire provoque ensuite des problèmes d’alimentation, de développement (la plante “peine” , elle est sensible aux maladies.
  • Plus tard en saison, munie d’un système racinaire superficiel, la culture résiste très mal à la sècheresse.

 

Le drainage permet d’éliminer l’eau en excès, donc

  • au sol de se réchauffer,
  • aux micro-organismes de mieux se développer,
  • aux racines de descendre correctement en profondeur,
  • et ainsi aux légumes de mieux se comporter au sec.

 

Le paradoxe n’est ainsi que apparent : un sol drainé permet d’économiser l’eau l’été.

*

Ainsi, de tous temps, les maraîchers ont eu tendance à s’installer sur les terres riches d’alluvions, les limons sableux amenés par les crues de certains fleuves et rivières, ou sur des terres de marais asséchés, d’où le nom de maraîcher donné dès le XVIII ème aux paysans qui y cultivaient des légumes.

Le bassin maraîcher du Louhannais dans lequel nous vivons et travaillons ne fait pas exception : il y a de «bonnes terres à jardin » pas loin de la Seille, rivière qui déborde et sort de son lit régulièrement. Notre jardin, bien que hors zone régulièrement inondable, est donc facilement gorgé d’eau en fin d’hiver, ce qui empêche le réchauffement du sol, son travail, et donc retarde beaucoup la période de production.

Au cours de l’histoire de l’agriculture, les excès d’eau ont traditionnellement été corrigés par le modelage du sol :

  • soit visant à surélever la partie de terre sur laquelle les graines seront déposées au semis : labour en billons traditionnels, et modelage des parcelles par le travail en ados toujours dans le même sens, création des « basses » de la Bresse bourguignonne. La création d’ados (ou buttes) est aussi le corolaire de l’arrosage à la raie, par exemple dans le Midi. Le travail en «planches permanentes» que nous avons mis en place sur notre jardin progressivement depuis le tout début des années 2000 est aussi une manière de surélever le sol de culture : par des buttes permanentes.
  • soit visant à creuser pour évacuer l’eau : fossés en amont de la parcelle cultivée, ou régulièrement répartis sur la parcelle (cf usage de la rigoleuse, qui n’est pas comme on pourrait le croire une machine qui s’amuse beaucoup mais un outil qui crée de petites rigoles pour l’écoulement des eaux de surface).

 

Les maraîchers des siècles passés ont complété ces techniques par le drainage avec poterie qui a été utilisé notamment dans la plupart des parcelles maraîchères des ex ceintures vertes des grandes villes (parcelles maintenant enfouies sous béton et bitume pour constructions verticales ou horizontales). Il s’agissait d’enterrer bout à bout de petits tubes de terre cuite en fond de tranchée creusée à la main (…) et d’en évacuer l’eau ainsi recueillie par un fossé d’écoulement.

Plusieurs parcelles de maraîchers de notre commune ont bénéficié de cette technique qui a cependant plusieurs inconvénients :

  • impossibilité de creuser profond pour limiter la largeur de terre bouleversée par ce travail. Cela entraine la nécessité de faire des tranchées rapprochées donc nécessitant beaucoup de drains tout en n’apportant qu’un résultat moyen dû à la faible profondeur des drains;
  • et bien sûr travail manuel très exigeant ! Une machine pour faire ce travail était fabriquée en Grande Bretagne dans les années 60.

 

Tout notre jardin est donc lui aussi drainé.

Ah bon ? Vraiment ?? Parce que le drainage, c’est bio ???

La technique du drainage des terres agricoles est fréquemment contestée dans les milieux écologistes (les paysans bio en sont d’ailleurs une variété quotidiennement et concrètement engagée, et terre à terre !) ce qui se comprend parfaitement quand on voit les conséquences de certaines réalisations. Mais il nous semble qu’il vaut mieux aller un peu plus loin dans la réflexion pour comprendre l’ensemble du problème.

Qu’est ce que l’on peut reprocher au drainage en général ? Principalement deux choses :

  1. au point de vue plutôt local : permettre la transformation de prairies inondables en terres de culture (souvent monoculture de maïs) ce qui y génère érosion et pollutions chimiques. Et participe à la création d’embâcles en cas de crue.
  2. au point de vue plus global : accélérer le cycle de l’eau en envoyant direct au fossé des eaux qui sinon auraient eu le temps de s’infiltrer, ce qui participe à l’assèchement de la nappe phréatique, et ce tout en aggravant les phénomènes de crues en aval.

 

Dans ces conditions, comment nous, paysans bio, pouvons donc drainer nos parcelles de jardin ?

1Parce que nos parcelles de jardin ne sont pas d’anciennes prairies permanentes inondables, drainées pour pouvoir les labourer. Ce sont d’anciennes terres de polyculture élevage hors de zone inondable, dont le sol limono-sableux a une vocation maraichère, raison pourquoi le circuit collectif d’arrosage des maraîchers les dessert depuis plus d’un demi siècle).

Drainage du jardin en 1995 :

http://sd-1.archive-host.com/membres/images/83700288762628507/drainage300/draineuse300.JPG

2 – Parce que sur notre ferme jardinière, les eaux de drainage ne sont pas envoyées aux fossés.

Valoriser une zone humide

Nos eaux de drainage, nous les collectons dans un grand bassin creusé dans une parcelle en dessous du jardin, trop humide pour la culture, et en partie inondable. Nous l’aons créé quand nous avons préparé la mise en culture de notre ré-installation à Sornay, en 1995.

photo du bassin de rétention au tout début de son remplissage le premier hiver

Il a été dimensionné de telle façon qu’il ne soit jamais à sec l’été, mais que en période humide, le trop plein se répartisse sur l’ensemble de la parcelle sans jamais être raccordé au réseau des fossés. Donc sans jamais aller directement – et rapidement – à la rivière : l’eau a le temps de  s’infiltrer lentement vers la nappe.

 

Avec les conditions très humides autour de ce bassin, des aulnes glutineux (arbres très riches en faune auxiliaire prédatrice principalement de pucerons et araignées, donc bien utile à nos cultures) se sont spontanément implantés tout autour du bassin.

http://sd-1.archive-host.com/membres/images/83700288762628507/pages/drainage_bassin_arbres300marq.jpg

Cette zone humide attire une grande diversité de plantes, insectes, batraciens, oiseaux, qui participent à l’équilibre biologique de notre ferme.​ Y pratiquer pas forcément tous les ans, des fauches tardives et sélectives de l’herbe permet d’entretenir la diversité de ce milieu. Cette prairie inondable n’a pas vocation à se transformer en forêt ! Ce qui n’empêche pas d’y faire un peu de bois pour la maintenir en état de prairie => lien

Même si des désastres comme celui ci, dans une parcelle qui n’était à l’époque pas encore drainée, ne se sont heureusement pas produits tous les ans, on peut sans hésiter affirmer que le drainage de nos parcelles n’était pas un luxe…

 

Drainer ne semble pas inutile !

Le drainage consiste à poser à bonne profondeur (déterminée par la topographie des lieux) et selon une pente régulière, des drains (tuyaux finement percés) dont le but est de capter l’eau en excédent, de l’amener dans des collecteurs qui débouchent dans un émissaire. Mais dans notre Biau Jardin de Grannod, c’est le grand bassin de rétention qui peut éventuellement déborder dans une prairie inondable mais n’est raccordé à aucun fossé d’évacuation.

Pratique du drainage

Nos chantiers de drainage ont été confiés à la CUMA (Coopérative d’Utilisation de Matériel Agricole) ASTER qui avait précédemment drainé les jardins de notre première ferme de Cercot – Moroges au début des années 80.

La parcelle sur laquelle nous cultivons nos carrés de jardin sont maintenant drainées. Le chantier a été réalisé par la CUMA ASTER en plusieurs temps :

  • 1995, préparation de notre réinstallation à Sornay,
  • 2009, élargissement de la rotation maraîchère avec la Guillamap,
  • 2018, aménagement de parcelle et construction d’un quadri-tunnel pour plus d’aromates et légumes de printemps.

 

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Pour aller plus loin

Articles « de terrain » très illustrés détaillant nos pratiques agricoles généralisables... Infos précises sur l’agriculture et son histoire, l’agronomie et les techniques, l’écologie, les énergies renouvelables, actus de la bio, ressources et références... Ainsi que fictions ou chansons autour de l’agriculture... C’est tout cela que nous partageons dans notre Base de Connaissances régulièrement complétée.

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